mercredi, avril 19, 2006

Imasu : «Toyal a été victime d'un procédé déloyal»

Critiqué dans le dossier du déménagement du site d'Accous, Masao Imasu, le patron du groupe japonais Toyal, répond aux autorités françaises et dénonce l'attitude du député Jean Lassalle.

LE FIGARO. – Quel est votre sentiment après le dénouement de l'«affaire Toyal» ?

Masao IMASU. – Dans cette affaire, de notre point de vue, il y a tant de malentendus que nous cherchions une occasion de nous expliquer. Cette occasion, c'est cette interview.
Cette affaire vient d'un problème de localisation. Pourquoi avons-nous notre usine européenne à Accous ? Parce qu'Alcan y a construit une centrale hydroélectrique pour profiter de l'eau de la montagne voisine, puis une usine d'aluminium en 1938, que nous avons reprise à partir de 1982. Après Accous, nous avons acheté du terrain dans le village voisin de Lescun pour nous agrandir. Cette fois, nous voulions encore nous développer, mais notre nouveau projet mettait en jeu des procédés chimiques complexes, dangereux et potentiellement polluants. Il reste deux hectares de terrain cultivable que Jean Lassalle voulait que nous utilisions, mais nous avons refusé, car ce terrain ne dispose d'aucune structure de sécurité, et qu'il est près d'un parc naturel.

Nous voulions limiter au minimum les risques environnementaux. Nous avons d'abord pensé implanter cette nouvelle usine en Allemagne, car c'est notre premier marché. Mais Total nous a proposé de reprendre un de ses sites de production, à Lacq, à 70 kilomètres d'Accous. Ce site bénéficie d'une excellente infrastructure adaptée à nos besoins, qui limitait les risques de pollution. Nous avons naturellement choisi ce site. C'est là que M. Lassalle, sur un malentendu, a pensé que tout Accous serait déplacé à Lacq. Objectivement, un tel transfert serait stupide et coûteux.

Qu'avez-vous dit à Jean Lassalle pour le faire fléchir ?

Nous lui avons clairement dit que nous n'avions nullement l'intention de déménager d'Accous, et que nous étions même prêts à y développer des infrastructures supplémentaires, hormis celles qui concernent notre nouveau projet «dangereux». Nous avons aussi écrit une lettre aux employés du site d'Accous pour expliquer notre position. Nous avons proposé d'acheter les deux hectares de terrain voisins, comme preuve de notre bonne foi et de notre engagement à Accous.

Malgré tous ces gestes, Jean Lassalle ne nous a pas crus et a poursuivi sa grève de la faim.
Avez-vous tenté de contacter Jean Lassalle quand vous étiez en France ?

François Bayrou m'a demandé de le rencontrer alors qu'il faisait une grève de la faim : c'était déloyal ! C'est comme s'il m'avait mis un couteau sous la gorge ! J'ai refusé de le voir tant qu'il ne s'alimentait pas. Mais au bout d'un mois, tout le monde s'inquiétait de sa santé. Alors j'ai reçu une lettre de conciliation de Nicolas Sarkozy, à laquelle j'ai répondu en expliquant notre position et en m'inquiétant de l'impact d'une telle affaire pour Toyal, qui était forcé de dévoiler sa stratégie à cause de cette affaire, et pour l'image de la France. Vendredi dernier, au matin, l'ambassadeur de France est venu me voir à Osaka, à la demande de l'Elysée, pour connaître ma position. Quelques heures après, un représentant de Toyal a signé un protocole dans le bureau de Nicolas Sarkozy, à Paris, qui a satisfait les exigences de Jean Lassalle.

Votre unité d'Accous est-elle rentable ?

Oui. Notre bénéfice progresse chaque année. Mais pendant les treize premières années, nous avons perdu de l'argent à Accous. Nous sommes néanmoins restés en pensant au potentiel du marché européen. Nous investissons environ 2 millions d'euros par an là-bas. Au moins Jean Lassalle peut-il faire l'effort de comprendre l'importance de notre contribution à cette vallée !
Combien d'emplois étaient en jeu à Lacq ? Que pense Total de cette annulation ?
Au début, cinq ou six emplois devaient être créés, mais ils auraient été suivis par d'autres créations. Avec cette annulation, Total doit trouver un nouvel acquéreur pour son site. Ça les ennuie sans doute, mais d'un autre côté, le gouvernement aurait peut-être forcé Total à ne jamais nous vendre son terrain...

Combien ce changement d'emplacement va-t-il coûter ?

Nous n'en savons rien encore ! Le gouvernement veut nous vendre le terrain proche d'Accous pour 1 euro. Mais nous devons étudier la faisabilité de notre projet là-bas, ses conséquences sur l'environnement et surtout sur le parc naturel tout proche. Il n'y a aucune structure d'urgence à Accous. Là-bas, il faut presque une heure pour que des pompiers ou des médecins se rendent sur les lieux en cas d'explosion. A Lacq, tout était prévu !

Avez-vous le sentiment de vous être retrouvé prisonnier de luttes politiciennes françaises ?

Peut-être M. Lassalle a-t-il utilisé cette affaire à des fins personnelles. Car Lacq est très proche d'Accous. Nous ne sommes pas allés en Allemagne, mais à 70 kilomètres de là !

Vous avez vécu de 1985 à 1990 en France. Avez-vous aimé votre séjour ?

Oui. J'aime la France. Quand j'ai dû rentrer au Japon, j'ai résisté à ma direction. Je voulais encore rester. Mais moi, je ne me suis pas mis en grève de la faim !

2 commentaires:

  1. Jean Lassalle devrait perdre son siège de député et devenir inéligible à vie.

    Nous sommes tombés dans le surréaliste, le paranormal. Mieux, il a en fait démontré l'impuissance telle du politicien face au marché "libre" des entreprises (je n'ai pas dit "sauvage" !), qu'il fallait tomber dans l'absolu pour pouvoir croire faire quelque chose ...

    C'est la démonstration des limites du politiciens. Jean Lassalle n'a pas accepté ces limites, il n'est pas digne d'être politicien. Soyons clair, la seule action politique qui aurait pu aller dans le sens de Lassalle est l'interventionnisme total, la nationalisation, le communisme.

    On nage dans le délire.

    Pour extrapoler, lorsque je vois ce genre d'attitude d'un politicien plus les évênements violents qui se sont produits en France depuis 6 mois (pour ... rien !?), je me dis qu'une radicalisation aveugle des mentalités et des actes est à venir en France ...

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